Le tremblement de terre. Cette catastrophe qui s'était abattue sur Lunacy m'avait laissé un arrière-goût quelque peu amer. Le malheur, c'est bien... quand ça arrive aux autres, pensai-je. Seul point positif dans tout ça, les souterrains de l'école avaient étés mis à jour, ça tombait parfaitement bien, je commençais à me lasser de l'infrastructure actuelle, dont je connaissais la configuration tellement bien que je m'y repérais sans problème, les yeux bandés alors qu'il faisait nuit noire - note que je ne savais toujours pas par quels passages secrets passaient les garçons pour épier le dortoir des filles.

- Je les aurais un jour, ceux-là, marmonnai-je dans ma barbe en descendant le long de la longue brèche qui s'était ouverte dans le sol, telle une plaie béante.

Qu'ils montrent ne serait-ce que le simple plus petit lambeau de chair dans ma chambre et je leur lacérais la peau jusqu'à-ce que des perles de leur sang s'écrasent à terre. Le clair de lune illumina un instant mon visage, lui-même étiré par un authentique sourire sadique. Que c'était bon d'être méchante. Respirant une dernière fois l'air de la surface, je plongeai dans les limbes qui me faisaient face. Je n'avais ni lampe torche, ni flamme, uniquement trois de mes sens pour me guider, l'aventure me grisait déjà d'avance.

J'avançais par petits pas, prudente. Des gravats roulèrent sous mes pieds puis s'arrêtèrent net, j'étais arrivée au fond. L'endroit avait l'air d'être un long couloir qui se prolongeait sur une centaine de mètres, les parois, parfaitement lisses, semblaient avoir été creusées à même la roche, je sentis l'humidité de la pierre sur ma main et une brise fraîche me fouetta le visage, éloignant mes quelques mèches rebelles de mes yeux et dévoilant ma boucle d'oreille aux ténèbres qui m'environnaient.

Je continuai de progresser, lentement, ensuite avec plus d'assurance, lorsque je sentis la matière qui se frottait à ma paume changer. Du bois... une poignée, une porte. Je l'ouvris sans plus de façon et rentrai dans la pièce. À peine avais-je posé le pied contre son sol grinçant que mes pupilles se dilatèrent sous l'effet de la lumière vive qui venait de s'allumer. Stoïque, j'attendis que ma vue se rétablisse avant d'analyser la situation. Cligner des yeux, se les frotter ou les plisser, c'est pour les faibles. Des ombres se formèrent, devinrent des silhouettes... Je n'étais pas seule ! Et mer... credi, grillée. J'allais finalement visiter le bureau de ce directeur mystique que presque personne n'avait encore vu.

Ma vue se rétablit, et je m'apprêtai à rendre les armes avec dignité lorsque... Ouf, ce ne sont que des miroirs. Coup de chance magistral, on ne m'y reprendrait plus à rentrer dans une pièce inconnue sans avoir vérifié s'il ne se tramait pas quelque chose de louche à l'intérieur.Je fixai mon reflet avec dégoût. Je détestais ce monstre à tête humaine qui me toisait d'un air supérieur, je pouvais faire tout ce que je voulais pour essayer de le démolir, jamais rien ne fonctionnait, mon pouvoir était inopérant sur moi-même. Cette chose, ce corps sans âme qui avait apparemment tout de même un cœur. Je m'approchai d'elle et lui envoyai mon poing dans le ventre. Pendant un millième de seconde, j'espérai que la vitre craquerai avant ma main mais, malheureusement, non. Elle ne fit que se fêler tandis qu'une fine ligne de liquide rougeâtre coulait tout son long et formait une minuscule flaque en dessous d'elle.
Je ne remarquai pas les ombres qui glissèrent en silence contre le mur derrière moi.