« ça pue le mystère à plein nez ici »

C'était toujours avec ce genre de situations que commençaient les journées étranges. De ces journées où se déroulent des évènements tellement inattendus qu'on aurait préféré rester dans son lit au chaud, et où on maudit le réveil qui vous rappelle sans cesse à l'ordre, lui et sa foutue fonction « je re-sonne au bout de dix minutes si tu n'appuies pas sur six boutons en même temps ». Et puis évidemment, pour bien vous donner envie de vous fracasser la tête contre le mur, vous ne trouvez pas votre brosse à cheveux ni vos chaussures. Et vous vous dites que le karma vous a rattrapé.
Les regards se tournaient vers la jeune fille quand elle passa dans les couloirs désespérément bleus de l'école à laquelle elle s'était plutôt bien habituée, en fin de compte. Et ce n'était pas pour ses longs cheveux blancs qui lui collaient au visage et qui se dressaient en des épis éparses. Encore moins ses impressionnantes iris ambrées qui cherchaient le sol. Ce qui étonna les gens, c'étaient ses pieds. Nus. Couverts par de simples chaussettes blanches qui s’élevaient jusqu'à ses genoux graciles.
Si la jeune albinos n'avait pas osé se montrer en cours et était allée se barricader dans un coin sombre de la grande bibliothèque, elle avait été amenée à partir à la chasse aux chaussures.

les seules chaussures que j'ai. d'ailleurs, j'ai pas vu de magasin de chaussures dans le coin. ça commence bien. foutu karma.

Sa recherche s'est avérée infructueuse. Et elle dut abandonner tout espoir quand une voix qui sortit des murs l'appela.

« Kalen de Lerio, Nezumi Ame, Moon Kurokawa et Aries Chris sont priés de se rendre dans la salle de classe 407 quel que soit leur cours. » fut la phrase qui lui foutut le moral à zéro définitivement.

Quand elle entra dans la classe concernée, elle était vide. Juste un grand homme que l'on voyait de dos, assis sur un fauteuil en cuir pour bien remplir tous les clichés, était présent dans la classe confinée. Parce que cet homme lui faisait incroyablement penser à un parrain de la mafia. Et en prime la chaise l'accueillit gentiment dans un grincement élégant qui aurait fait grimacer n'importe qui.

si c'est un parrain qui lit dans les pensées, je suis morte.

Mais une tête blonde qu'elle reconnut comme celle de sa camarade de chambre, Nezumi, vint la sortir de ses spéculations fantasques. Elle lui sourit en guise de salutation. De peur qu'émettre ne serait-ce qu'un seul bruit irrite le mafieux.

Et ce fut au tour d'Aries, une de ses rares amies, de faire son entrée. Accrochée à un garçon qu'elle présuma être le fameux Kalen de-quelque chose qui a été convoqué par le mafieux, lui aussi.
Celui-ci se tourna vers les jeunes gens en pivotant sa chaise, comme dans les vieux films.

« Bien, vous êtes tout les quatre réunis? Parfait parfait. Bon, comme vous le savez, cette école est ouverte seulement depuis cette année. Il n'y a donc que des premières années ici. Mais dans tous nos élèves, vous faites parties des seuls qui ont fini leurs années entièrement: c'est à dire 365 jours complets. Beaucoup d'élèves ont rejoint cet établissement en cours d'année, mais ici on ne change de classe qu'au bout de 365 jours. Or, je vous souhaite mes félicitations, vous avez supporté tout ce bleu depuis une année et vos résultats scolaires vous permettent de devenir des deuxième années! Bravo et bonne continuation. Bien sur, cela enquiert des des avantages et... Des inconvénients, je vous laisse découvrir ! »

pourquoi le parrain nous parle comme s'il était le dirlo ? je la sens pas cette histoire.

Et le mafieux se téléporta. La jeune albinos ne savait plus quoi penser.

« A votre avis quand il parlait d’inconvénients, à quoi pouvait-il bien faire référence ? Avec un directeur comme lui on peut s'attendre à tout... »

Moon tiqua à cette phrase.

mais enfin, pourquoi le dirlo est un mafieux ?

« Dites, l'un de vous n'aurait pas vu des chaussures abandonnées dans l'école ? Noires, petites, des ballerines assez banales. » fit-elle. Et elle ne put s'empêcher de se tortiller sur sa chaise. « Ah, oui, les inconvénients. Bien sur. Une évaluation pour estimer nos capacités, peut être. Sinon, le directeur va peut être nous donner des responsabilités. Gardiens des dortoirs peut être. Je me demande. »

ou bien une séance de torture mentale avec le parrain-dirlo.
on peut s'attendre à tout, ici.

La porte se verrouilla. Dans un petit bruit qui la fit sursauter sur sa chaise déjà malmenée.

bien. BIEN. au moins, on a trouvé ce que le parrain-dirlo entendait par "inconvénients".
reste plus qu'à savoir à où ça va nous mener...

Je dormais. On était en plein cours et moi je ronflais avachie sur ma table. Non, ce n'était pas une nouvelle discipline scolaire, juste moi, morte de fatigue. J'avais surtout perdu l'envie de travailler. Dimitri n'était plus là. Avec toutes les histoires de secrets sur l'académie, je l'avais un peu négligé, parce que je voulais le protéger. Et un beau jour, impossible de le trouver dans l'academy. J'avais demandé un rendez-vous avec le directeur qui m'avait annoncé fièrement qu'il avait décidé de quitter l'academy, ses instincts de vampires devenant beaucoup trop présents. En fait, il m'avait abandonné là, seule, aux griffes de Fairy et de son principal à moitié taré. Ou alors on me mentait et le dossier scolaire de mon ancien copain avait été barré d'une croix rouge. J'avais trop la trouille de vérifier dans le bureau que Jun et moi avions découvert. Je n'en avais d'ailleurs toujours pas parler autour de moi. Plusieurs fois, j'avais tenté de le dire à Aries, mais je n'osais pas. J'avais peur de semer la panique, de me faire des idées, ou de mettre les autres en danger. Pourtant, il aurait fallu en parler. La douloureuse épreuve de la perte de Dimitri passée, ce qui avait duré un certains temps, je n'avais plus goût à rien. A part encore et toujours le violon. Alors un cours, ça n'avait rien de distrayant. Bref, je dormais.
« Kalen de Lerio, Nezumi Ame, Moon Kurokawa et Aries Chris sont priés de se rendre dans la salle de classe 407 quel que soit leur cour. »
C'est ce message dans le haut parleur qui me réveilla dans un sursaut. La trace de mon sweat sur le visage, j'ouvris péniblement les yeux pour fixer le prof. Ce dernier me vit émerger au fond de la salle et me fit un petit signe de la main. Bienvenue parmi nous Mademoiselle Huruma ! Cours de télépathie. Le prof n'était pas drôle et terriblement barbant, et en plus, il s'immisçait dans mon esprit comme s'il agissait d'un moulin. Vous comprenez mieux pourquoi je ne supporte plus les cours ? Après cette annonce, une vague de murmures curieux déferla dans la salle. Je me demandais bien pourquoi ils étaient appelés tous les quatre. Ils n'étaient pas du genre à se prendre des heures de colle, surtout Moon et Aries. Kalen pouvait bien avoir trop dormi durant les cours, ou Nezumi avait peut-être séché, mais rien de grave qui nécessiterait un message dans les haut parleurs. Sur ces entre-faits, je fis un énorme sourire au professeur qui haussa les épaules pour retourner à son cours. Et je m'affalai de nouveau sur mes bras croisés sur la table.
Au bout d'une dizaine de minutes, un surveillant frappa à la porte avant d'entrer sous l'invitation de mon cher prof télépathe. L'homme à la carrure imposante me fit froid dans le dos; les pions de Fairy n'étaient vraiment pas commodes. Il murmura quelque chose à l'oreille du prof que je ne pus m'empêcher d'écouter télépathiquement.
« Le directeur demande à voir Yuki Huruma en salle 407 avec les autres. Il a oublié de la mentionner. Il n'était pas certains de vouloir cette fouineuse près de lui. ». Cette dernière phrase était pour lui-même, et je doutais que le professeur fut assez peu respectueux pour l'avoir écoutée. Il était très droit, pas du genre à "fouiner" justement. Je me mordis les lèvres. Ils se tournèrent vers moi alors que je tentai de prendre un peu de contenance.
- Mademoiselle Huruma ? Pouvez-vous vous rendre en salle 407 ?
J'ouvris des yeux surpris, pour faire croire que je n'étais pas déjà au courant de ce qui m'attendait et hochai la tête.
- Euh, oui, tout de suite, bredouillai-je.
Je commençai à remballer mes affaires mais le surveillant me fit signe que ce n'était pas la peine.
- Ce ne devrait pas être long, pas d'inquiétude. Vos affaires seront portées dans votre chambre en cas de prolongation, déclara-t-il de sa voix grave.
J'opinai timidement et me dirigeai vers les deux hommes sous le regard intéressé des élèves de la classe. Parmi eux, Jun, qui me fixait sans comprendre, l'air peut-être de paniquer un peu. Mais c'était impossible que ce soit par rapport au secret. Je lui souris discrètement. Tout allait bien. Le surveillant m'ouvrit la porte et je quittai la salle sans un mot.
- Salle 407. Dépêche toi, tu es en retard. Il serait bête d'avoir des regrets, ricana-t-il entre ses dents.
« Ils ne se doutent pas de ce qui les attend. Le directeur est un génie. ». Prise d'une certaine panique, j'acquiesçai et partis en courant. Ce maudit directeur ! Qu'est-ce qu'il nous préparait encore ? Et pourquoi voir fait venir Moon, Nezumi, Aries et Kalen ? Je déguerpis dans le couloir en cherchant la bonne classe. Arrivée dans le couloir des 400, je ralentis un peu la cadence, entendant déjà quelques murmures de pensées. Je me concentrai pour fermer mon esprit. Avec une année de pratique, j'avais moins mal à la tête, mais ça n'en restait pas moins épuisant. Je fis quelques pas rapide avant de me jeter sur la porte, la peur au ventre.
Moon et Nezumi étaient assises l'une à côté de l'autre, Aries un peu en retrait sur une autre chaise, Kalen debout près d'elle. Ils me regardèrent comme s'ils n'étaient pas au courant de ma venue. J'avais le souffle court après le marathon que je venais de me taper dans les couloirs. Soudain mal à l'aise, je levai la main pour leur faire signe, mais comme c'était terriblement con, je me ravisai. Je tentai de sourire maladroitement. Je fis un pas, et derrière moi, j'entendis la porte se verrouiller. De l'extérieur. On venait de nous enfermer. Bordel, c'est quoi ce délire ? Ça va pas recommencer ! La salle de classe était banale, comme les autres, bleue, avec des tables et des chaises, un tableau, des fenêtres. La raison de notre venue ? Je n'en savais rien, j'étais certainement en retard.
- Je crois que ça peut faire partie des inconvénients. Ça a un drôle d'air de déjà vu, cette histoire. À mon avis, on va avoir du mal à ouvrir la porte... Sinon, salut Yuki, qu'est-ce que tu fais là ? dit Nezumi en fronçant les sourcils.
Ok. Ils ne savaient pas que je devais venir. Je me décalai de la porte en jetant un regard méfiant au dessus de mon épaule.
- Euh... Salut... Bah, je ne sais pas. C'est un surveillant qui est venu me chercher en classe. Je devais aller en salle 407, c'était juste après l'annonce vous concernant.
Je me grattai la tête, encore peut habituée à mes cheveux courts. Oui, je les avais coupé. Une envie après le départ de Dimitri, il fallait que je change, histoire d'oublier le passé. Maintenant, je voulais aller de l'avant et percer enfin le secret de Fairy. Je relevai la tête pour esquisser un sourire.
- Vous pouvez m'expliquer ce qu'il se passe au juste ? fis-je en haussant les épaules.
Je me tournai de nouveau vers la porte et la pointai du doigt.
- Ah, et je vous jure que c'est pas de ma faute si elle s'est refermée... On est encore dans de beau drap, à doubles tours dans une classe !
Je devais avoir l'air blasée, mais aussi encore un peu paniquée. Je ne savais vraiment pas ce que nous réservait le directeur, mais avec lui, je ne prévoyais rien de bon. Ou en tout cas, rien de bon pour nous.

« après la mafia c'est au tour des ninjas »

Un trou. Il y avait un trou dans le plancher. UN TROU. Qui avait été construit là pour qu'on le découvre. Cette histoire commençait réellement à mettre la jeune albinos mal à l'aise. Ils étaient maintenant là, à cinq, à fixer le trou qui s'était formé dans le plancher. Avant qu'Aries ne se décide à descendre. La jeune Moon la talonna tout comme les trois autres adolescents en clignant des yeux à cause des nuages de poussière.

« Franchement si c'est aussi peu résistant, 'il' savait surement qu'on passeraient par là. J'ai l'impression d'être une marionnette ... »

Sur quoi elle força une porte d'un humble coup de pied. Qui s'ouvrit, euhm, se brisa sur un bureau miteux. Tout recouvert d'une couche de poussière poisseuse. Mais une chose se démarqua dans cet environnement sale. Une lumière. Blanche et chaude. Et carrée. Ce fut une des première fois que la jeune Moon vit un ordinateur. De là où elle vient, la technologie on connait pas.

La jeune fille vit son amie s'approcher de l'engin. Elle la suivit. L'ambiance l'intimidait. Elle ne savait toujours pas si les intentions du directeur étaient bonnes ou mauvaises. Elle préférait rester sur ses gardes.

« Euhm, ça marche comment un ordinateur ? J'y ai jamais touché moi à ce truc... La jeune fille souffla en fixant l'écran lumineux. Il semblait la narguer. Les trucs carrés là, il faut appuyer dessus ? »

La jeune Moon s'approcha du clavier immaculé et appuya sur une des touches. La plus grande, celle avec une flèche marquée dessus. L'écran émit alors un bip qui la fit sursauter. Sur quoi une fenêtre avec l’emblème de l'école, un pingouin bleu, s'ouvrit devant ses yeux ébahis.

« Dossiers secrets. »
« Deuxième années. »
« Informations confidentielles. »

Les dossiers suspects s'enchainaient. Jusqu'à tomber sur un nom qui intrigua les élèves. Qu'ils ne purent s'empêcher d'ouvrir.